A 35 ans, Nathanael Shahmaei a remporté sa première victoire en début de saison, remonter sur un vélo en compétition. Un retour réussi pour le sociétaire du Paris Cycliste Olympique, victime d’un grave accident en fin d’année 2014.
Radio Peloton : Nathanael, c’est un miracle de vous retrouver sur un vélo…
N.S : Oui c’est sûr, surtout un miracle d’être encore en vie tout simplement. Le vélo reste « seulement » une passion mais loin d’être l’essentiel. C’était la veille de Noël 2014. J’étais à Grenoble pour les vacances. Soleil radieux. Je décidais de rouler une heure avant de rentrer sur Paris avec mes enfants. Une voiture me fauche de plein front dans un carrefour, éblouïe par le soleil. Le choc fut très violent. Je m’en sors « qu’avec » les deux jambes cassées.
Radio Peloton : Avez-vous pensé que vous ne remonteriez jamais sur un vélo ?
N.S : Je ne me rappelle pas y avoir pensé. Des fois tu doutes. Étant moi-même kinésithérapeute du sport, je savais que le chemin serait long mais pas impossible. J’ai su m’entourer des meilleurs. J’ai surtout eu beaucoup de chances car les suites de réadaptation m’ont été très favorables. Les douleurs, les souffrances sont le lot quotidien. L’important c’est de se projeter vers l’avenir, quel qu’il soit et de maintenir le cap.
CIF : Qu’est ce qui a motivé votre retour?
N.S : Certains moments sont très difficiles à vivre. La solitude. La fatigue. L’inactivité physique. Alors tu penses aux personnes que tu aimes, ta famille, ta femme, tes enfants, tes parents ; c’est eux qui te rendent ta dignité et ta fierté. Il y a vingt ans, je suis venu au vélo grâce à mes potes et nos pères respectifs. Tout a commencé au Ventoux. Alors s’il fallait « boucler la boucle », cela ne pouvait se terminer qu’en haut du Mont Chauve. Je m’en suis donné les moyens. J’ai toujours été un taiseux, voire un hargneux ou un teigneux.
Radio Peloton : un retour gagnant avec trois tops 5 en ce début de saison…
N.S : C’est un peu une surprise…je l’espérais mais je doutais beaucoup aussi. Pour revenir à ce niveau, j’ai du rester appliqué tout l’hiver. L’histoire aurait été Hollywoodienne si j’avais levé les bras. Mais j’étais déjà trop heureux de pouvoir jouer la gagne à chaque fois.
Radio Peloton : Qu’est ce qui vous a manqué pour l’emporter ?
N.S : Qu’est ce qui m’a manqué ? La même chose que les 80 autres du peloton sur ces courses. Non sans rire, l’accident m’a appris à développer beaucoup de résistances dans l’effort. Il me manque cette force explosive. Je ne suis pas un « tueur » sur le vélo car ce n’est pas mon style et j’en ai plus les capacités.
Radio Peloton : L’ambiance a l’air bonne au Paris CO chez les départementaux…
N.S : Depuis mon arrivée au club en 2013, les sociétaires ont toujours été de bonne facture. Christian Masola y ait pour beaucoup. En tant que président du club, il nous insuffle cette philosophie alliant compétitivité et convivialité. Cette année, tous les ingrédients sont là pour réaliser un grand cru, un millésime.
Radio Peloton : Vous avez retrouvé la 3e catégorie, fin mars…
N.S : J’ai terminé 2014 en marquant des points en fin de saison en 3ème catégorie. Le système de points étant ce qu’il est, en 2015, je suis resté licencié en 3ème catégorie avec mes béquilles et mon fauteuil roulant. Une dérogation médicale m’a permis de débuter 2016 en départementale afin de me laisser la latitude nécessaire.
Radio Peloton : Quelles sont vos ambitions dans cette catégorie ?
N.S : Le plaisir. Courir avec mes amis du club. Tristan Horreaux, Jonathan,Machado Gilles et Thomas Martin, Francis Gillain et tous les autres. Être performant et glaner des prix d’équipe. Mon terrain de jeu favori. Les « classiques » de l’été.
Radio Peloton : Le niveau D1 est-il semblable, selon-vous,à un niveau 3e catégorie sur certaines courses ?
N.S : Je n’ai jamais joué la gagne trois dimanches de suite en 3ème catégorie comme j’ai pu le faire récemment en D1. Non, cette comparaison n’est pas très respectueuse pour les coursiers qui font l’effort de rester en 3ème catégorie.
Radio Peloton : On vous croisera dans d’autres disciplines cette année ?
N.S : Avant mon accident, je voulais me tourner vers la piste et ses catégories masters. Gagner des titres reste un doux rêve…
Photo : Gérard Briand.