Pour la 75ème fois, les Cycles Alex Singer ont associé leur nom à celui de l’ACBO pour organiser leur traditionnel Rallye de Printemps.
Plutôt que de relater cette matinée par le menu, finalement classique dans son déroulé (il est vrai que les parcours et les contrôles, bien établis dans le temps et l’espace, présentent une forme d’invariance temporelle que d’aucuns – dont je suis – souhaiteraient immuables), j’ai choisi, en la forme du présent essai, d’essayer de dégager quelques traits qui caractérisent l’évènement.
La date tout d’abord.
Il s’agit du 1er dimanche de mars. C’est comme cela (n’en déplaise à certains ronds de cuirs), et cela ne pourrait en être autrement. Le mois de mars, chez les cyclistes, possède une valeur de symbole. C’est le passage de l’hiver au printemps, le mois où l’on espère enfin retirer ses jambes blanches (et velues pour certains – je n’ose dire certaines, notez-le) de la laine pour enfiler les corsaires, voire même, suprême bonheur, les cuissards. C’est le mois des randonnées qui s’allongent, des 200 qui se profilent, des mollets qui s’affutent, des espérances qui naissent dans l’orgueil des matins de printemps. C’est le mois au cours duquel les grandes courses débutent, de Paris à Nice, de Milan à San Remo, avant les grands rendez-vous d’avril sur les pavés et dans les Flandres. C’est enfin le mois au cours duquel la nature se réveille, et où fleurissent les petites jonquilles qu’Olivier et moi allions cueillir avec Léone dans la forêt d’Hallatte (toujours entre le Rallye et les 100 de Saint Denis – qui eux ont disparu, avalés par les autoroutes). Le 1er dimanche du mois de mars, c’est tout cela, et c’est donc important.
Le lieu ensuite.
L’arrivée se passe à la boutique Singer. Normal me direz-vous, puisqu’il s’agit du Rallye Alex Singer !
Oui, mais si l’on y réfléchit bien, combien d’organisations proposent-elles une arrivée dans un magasin considéré par beaucoup comme un lieu culte, la caverne d’Ali Baba des amoureux du vélo, l’essence même de l’esprit vintage ? Quel bonheur de pouvoir regarder les machines, considérer les émaux et les raccords en toute quiétude, flairer l’odeur mystérieuse de l’atelier qui est derrière, échanger quelques mots avec les habitués (« introduits » ?) des lieux qui y déambulent avec aisance et le sourire aux lèvres !
C’est autre chose qu’une arrivée dans un gymnase sentant le plastique et les subventions maigrichonnes.
Et par-dessus tout, la rue appartient aux cyclistes : l’on s’interpelle, se nomme, traverse la RD909 à l’envi, et sous le regard bovin des automobilistes du dimanche matin, le tout dans une atmosphère qui, on le voit bien, est imprégnée de l’aura de la petite boutique.
Le lieu est une grande partie de l’affaire, nul doute.
Enfin, l’ACBO.
Nous nous sommes souvent posé cette question : pourquoi sommes-nous si bien à l’ACBO ?
Etant membre du club depuis plus de 40 ans, ma réponse pourrait être partisane. Mais si je prends l’occasion du Rallye Singer, je dirai que la façon dont le Club a piloté l’évènement donne la plus grande partie des réponses : mobilisation autour des contrôles et de l’organisation, prise en charge des invités dans plusieurs groupes roulant à leur allure, solidarité dans le vent et les crevaisons, esprit cyclotourisme insufflé par les anciens (nous roulons parfois vite, mais tout le monde rentre – toujours – ensemble), convivialité assumée autour de la cochonnaille et du terroir de nos régions dans l’arrière-boutique.
Et pour finir, notre repas de club, auquel se joignent toujours des invités que nous apprécions et qui nous apprécient, dans une bonne ambiance si sympathique que nous nous étonnons qu’elle soit toujours si vivace.
Mais par-dessus tout et à la fin, je dirai tout de même que ce qui fait vraiment la différence…c’est la boutique. Et là est le grand secret, parce qu’à la fin, être membre de l’ACBO, c’est quelque part franchir la porte qui permet, au bout d’un temps (plus ou moins rapide) d’adaptation aux us et coutumes du lieu, de monter l’escalier caché derrière le stock de jantes, et d’être enfin reconnu comme membre à part entière.
Un vrai Club, dans toute l’acceptation du terme, finalement.
C’est donc tout cela, le Rallye Singer : l’association d’une date bien choisie, un lieu culte, et un vrai Club. Et cela a fonctionné depuis 1941.
Merci à Olivier Csuka pour le communiqué
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